2013
Création de la start-up Kingo Energy
Depuis 2015
181 990
personnes connectées à Kingo
D'ici 2020
2 millions
de foyers équipés
Au Guatemala, un habitant sur dix n’a pas accès au réseau national d’électricité. Une start-up locale propose désormais le kit Kingo, un boîtier innovant et autonome qui produit de l’électricité solaire à bas coût. Plus de 15 000 foyers sont déjà équipés dans le pays. Le début d'une aventure qui change la vie des populations concernées.

Un seul élément vous manque, et tout est dépeuplé. En Amérique centrale, où une part significative de la population ne peut appuyer sur un interrupteur le soir venu, l'accès à l'électricité est un enjeu majeur de développement. Malgré les progrès importants réalisés entre 1990 et 2010, plusieurs millions de personnes sont encore privées de connexion à un réseau électrique. Au Guatemala, on compte ainsi plus de 300 000 foyers non raccordés qui s’éclairent à la bougie, au kérosène ou grâce à un groupe électrogène. Insatisfaisant, dangereux, cher. 

Depuis quelques années, un air nouveau souffle dans ce pays grâce à une innovation locale dédiée aux zones les plus reculées du pays : Kingo, un boîtier intelligent installé en une vingtaine de minutes par simple raccordement à un panneau solaire. Cette production autonome est totalement déconnectée du réseau électrique national et indépendante des infrastructures centralisées.

Derrière ce boîtier magique orange, il y a Kingo Energy, société créée en 2013 dans laquelle Proparco, la filiale de l’AFD dédiée au secteur privé a pris une participation en 2016.

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Juan José et la stratégie financière de Kingo
Juan José Estrada Toledo est le jeune directeur financier de Kingo. L'associé de Juan Fermin Rodriguez analyse l'importance décisive de partenaires comme Proparco, la filiale de l'AFD dévolue au secteur privé :

« Comme dans la plupart des start-up, l'élément clé ce sont les gens, y compris dans le genre d'investisseurs dont vous avez besoin pour votre croissance et qui comprennent votre stratégie. Pour Kingo, il s'agit de développer une croissance rapide, sur plusieurs pays. Une fois que vous avez atteint un certain seuil et que vous avez besoin de davantage de liquidités, vous pouvez aller trouver les institutions financières de développement et les banques de développement qui constituent votre tremplin vers un marché plus large.

Les partenaires institutionnels nous ont permis de bien valider notre modèle avant d'entamer une phase d'expansion plus poussée. Ils représentent aussi un gage de confiance, une sorte de caution pour d'autres investisseurs. Parce que ces institutions ont des règles et des exigences strictes en vertu de critères internationalement reconnus.

Ils nous ont aussi aidé à organiser l'entreprise de l'intérieur, son cadre juridique et financier, pour être véritablement prêts à recevoir des financements supplémentaires venant de fonds plus importants ou d'autres bailleurs ».
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Juan Fermin Rodriguez, visionnaire solidaire
Pour Juan Fermin Rodriguez, le fondateur de Kingo qui est né, a grandi et étudié au Guatemala, « il y a une corrélation très importante entre l'accès aux services de base et le développement ». Comme « 70 % des Guatémaltèques vivent dans une forme de pauvreté à des degrés divers », c'est là-dessus que Kingo a décidé de concentrer son action.

En parallèle, les engagements du jeune entrepreneur doivent rimer avec rentabilité. « Je crois fermement que notre approche est la bonne et que nous pourrons à la fois être profitable et servir le bien public, veut croire Juan Fermin. Ce qui compte pour nous, c’est que nos services, nos logiciels, les matières premières de nos équipements soient de plus en plus performants et permettent d’offrir davantage de services à nos utilisateurs. »

En bon entrepreneur de sa génération, Juan Fermin voit déjà demain : « Avec l’arrivée sur le marché de nouveaux composants, nous allons pouvoir créer des batteries plus petites et de plus longue durée, donc atteindre des zones encore plus reculées et devenir une solution accessible à encore plus de personnes. »
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La nouvelle vie d'Elena et de sa famille
Pour Elena Laj Yuja de Gua, il y a un avant et un après Kingo. Elle et son mari Jorge se sont installés il y a deux ans dans le village de Caserío El Limón, dans la province du Péten, à cinq heures de route de la capitale Guatemala City. Cette mère de quatre enfants a vu sa vie changer avec l’arrivée du petit boîtier orange :

« Avant, il fallait se lever plus tôt, entre 4 et 5 heures du matin, et s’éclairer à la bougie pour préparer les repas de la journée, explique la jeune femme d'un ton assuré. A présent, il est possible de s’organiser différemment, de se lever plus tard, de passer plus de temps avec la famille, de remplir mes tâches pour l’association des femmes du village. Surtout, cela permet aux enfants d’étudier une heure par jour. Jamais je n’avais imaginé que Kingo viendrait ici. »

Comme elle, quinze familles du village utilisent désormais Kingo, car « tout le monde veut la lumière ! » Avec son forfait Kingo, Elena peut éclairer sa maison plus de cinq heures par jour, recharger son portable, organiser les devoirs des enfants et sécuriser la maison tout en faisant 25 % d’économies chaque mois.

« Avant, je devais acheter des bougies et j’en utilisais trois ou quatre par jour », se souvient Elena. « Il y avait forcément un risque d’incendie. Sans compter le danger, une fois la nuit tombée, d’avoir des vipères dans la maison alors que les enfants jouent encore. Avec la lumière, les animaux ne viennent plus et les enfants peuvent jouer ou étudier quand il le faut. »
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Comment ça marche ?

L'un des gros atouts de Kingo réside dans sa simplicité d'utilisation, mais aussi d'installation. Pour commencer, un capteur solaire individuel est installé sur le toit de la maison. Le client signe un contrat sans engagement assorti du paiement d'unités de temps, comme pour les recharges de téléphone portable. Une fois le kit installé et les codes prépayés renseignés, l’accès à l’électricité est débloqué.

À aucun moment, la procédure d'installation n'utilise le réseau téléphonique. La mise en route de Kingo est donc possible dans les zones les plus reculées. Le système n’implique par ailleurs ni achat de matériel par le client, ni paiement de l’installation du dispositif. Ce dernier intègre une garantie et un service après-vente permanent assuré par les équipes de Kingo sur simple appel.

Les clients ont le choix entre deux offres : la première permet d’alimenter chaque jour trois ampoules pour cinq heures d’éclairage et de recharger un téléphone portable. Le tout pour 70 centimes d’euros par jour ou 13 euros par mois. Avec la seconde, on peut éclairer la pièce principale de la maison pendant cinq heures, recharger trois téléphones portables et alimenter deux équipements électriques (télévision, ordinateur, etc.).

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Développement à l'international

Pour les dirigeants de Kingo, les besoins des populations et le marché du petit boîtier orange ne s’arrêtent pas aux frontières du Guatemala. Après une première levée de fonds de 13,5 millions de dollars, dont 4 millions de prêts, Juan Fermin et son équipe entendent lever 8 autres millions de dollars lors d’une seconde levée de fonds qui permettrait de lancer Kingo au niveau régional : en Colombie, au Honduras, au Nicaragua et au Mexique. 

Institutions financières et capitaux privés, les piliers de Kingo
Dans un marché aux forts besoins en investissements, le développement de Kingo passe par l'engagement des institutions financières et du secteur privé.

Tout le monde sait qu'elle va exploser, mais personne n'a encore trouvé la recette miracle pour la diffuser massivement. L'énergie solaire est confrontée à un paradoxe : elle est la solution reconnue pour les populations privées d'électricité dans le monde - avec un marché potentiel similaire à celui de la téléphonie mobile. Mais les investisseurs traînent la patte pour s'y lancer. À leur décharge, les investissements nécessaires sont énormes pour équiper des foyers à l'échelle d'un pays ou d'un continent, dans des zones très rurales ou désertiques, difficiles d'accès et mal desservies.

Si jusqu'à aujourd'hui, aucun modèle économique n'est encore parvenu à s'imposer, Kingo compte bien changer la donne. Grâce, notamment, à la confiance d'investisseurs comme le groupe AFD : « Notre connaissance du marché et notre adaptabilité nous permet d’investir de façon rentable tout en réduisant les écarts de pauvreté », estime le directeur de Kingo Energy, Juan Fermin Rodriguez. « Toutefois, les besoins financiers étant ce qu'ils sont, il est essentiel d’être accompagnés par des partenaires qui acceptent de prendre des risques que les banques locales ne sont pas en mesure de prendre ».

Un engagement d'autant plus important dans un pays comme le Guatemala où l'État souhaite limiter l'endettement public au maximum. Ajoutés à la baisse de 80 % du coût des installations solaires depuis 2008, l'aide des institutions financières internationales et l'apport des capitaux privés seront les deux leviers du succès de Kingo. Bien au-delà du Guatemala.

Éclairer les communautés rurales au solaire et à bas coût